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Cas@d€i - Page 7

  • Les souvenirs viennent à ma rencontre

    Edgar Morin a plus de cent ans! Né en 1921, il a traversé toutes les épreuves de l'après première guerre mondiale. Guerre d'Espagne, résistance, guerre d'Indochine, guerre d'Algérie, Viet-Na. il, décolonisation, chute de l'URSS,  a été confronté à toutes les modes idéologiques, communisme, surréalisme, situationnisme, les écoles de sociologie. Il a été chercheur au CNRS en sociologie, spécialisé à l'origine dans le cinéma, dès l'âge de trente ans. Une sorte de sinécure à une époque où les chercheurs pouvaient déjà largement télétravailler.

    Il a beaucoup voyagé, énormément publié, rencontré un nombre innombrable de femmes, s'est parfois trompé de combat mais a su assez tôt s'extirper du parti communiste et dégager sa propre voie, celle de la "complexité", une sorte de "en même temps" qui l'a rendu prudent, tolérant et surtout généreux.

    Un bon millier de pages de souvenirs agréables à lire avec des portraits de beaucoup de ceux  qui ont compté comme intellectuel au XX siècle.

  • Correspondance de Flaubert

    C'est à la suite de l'écoute des Chemins de la Philosophie de France Culture en mars 2021 que j'ai décidé de me plonger dans la correspondance de Flaubert, pas la totalité publiée dans la Pléiade, mais seulement des extraits sélectionnés et présentés par Bernard Masson.

    Bien m'en a pris! J'ai lu à voix haute une lettre par jour le matin au réveil avant de me lever. Il y a 297 lettres présentées chronologiquement. Dix mois de lecture donc sans faillir un seul jour. Un rituel.

    J'ai ainsi vécu entre Croisset près de Rouen, Paris, mais aussi L'Egypte, la Tunisie, Deauville. Flaubert a assez peu voyagé. Un homme très fidèle avec les siens, sa mère, sa nièce, ses amis.

    Tous entier consacré à l'édification de son oeuvre, misanthrope, il ne se mariera pas, n'aura pas d'enfants, fréquentera les prostituées en Egypte et en Tunisie au cours de voyages comme on n'en fait plus aujourd'hui, les demi-mondaines à Paris, il finira sa vie quasi dans la misère mais avec tout de même des employées de maison, le mari de sa nièce pour lequel il s'était porté caution l'ayant ruiné ou presque. Il bénéficiera sur l'insistance de ses amis d'une sorte d'emploi fictif. Flaubert a toujours vécu de ses rentes sans vivre de ses livres, il n'aurait pour rien au monde accepté un travail qui l'aurait détourné de sa tâche.

    La rédaction de chaque ouvrage, est une épreuve intellectuelle et physique planifiée avec une énorme documentation et des mois de rédaction, une souffrance, qu'il s'agisse de la Bovary, de La tentation de Saint Antoine, une oeuvre remise régulièrement sur le métier, Salammbô, Bouvard et Pécuchet qui restera inachevé. Ses trois contes paraissent plus facile. Le style bien sûr est la préoccupation première. Heureusement Flaubert n'a pas vécu aujourd'hui, il aurait détesté les oeuvres d'auto fiction ou l'écrivain se met directement ou indirectement en scène, il considérait au contraire que l'écrivain se devait de ne rien écrire le concernant dans son oeuvre. Il détestait la bêtise, raison pour laquelle il entreprit Bouvard et Pécuchet, n'aimait pas son époque, la modernité, le naturalisme

    On découvre pendant la guerre de 1870 un Flaubert combattant, à presque 50 ans , il fait des rondes armées dans Rouen

    Il correspond essentiellement avec des écrivains ; Louise Colet, sa muse, George Sand, Louis bouilhet, Maxime du camp, les Goncourt, ZolaGuy de Maupassant, son disciple, Melle Leroy de Chantepie une fervente catholique, qu'il ne rencontrera jamais, mais aussi la princesse Mathilde, Mme Brainne, des femmes de salon, des demi-mondaines

    Il meurt d'une attaque cérébrale en mai 1881 à 59 ans encore plein de projets mais visiblement fatigué par une vie d'efforts continus.

  • Joseph le Nourricier

    Joseph le Nourricier est le quatrième et dernier tome de Joseph et ses frères, après Les histoires de Jacob, le jeune Joseph, et Joseph en Egypte, déjà chroniqués.

    Accusé injustement d'avoir commis l'irréparable avec la femme de son maitre Potiphar à l'attrait de laquelle il a en fait résisté, Joseph est envoyé en prison et retombe au plus bas de l'échelle. Mais Potiphar lui a trouvé une prison accommodante et là encore il va faire preuve de tous ses talents avec l'aide d'un geôlier compréhensif dont il va devenir l'intendant.

    Et puis arrive un jour deux hommes de la cour du pharaon dans l'attente de leur procès, ils sont accusés de tentative d'empoisonnement. Joseph en interprétant leurs songes va indiquer à l'avance lequel est innocent et lequel est coupable. Plusieurs années plus tard à la cour du Pharaon, personne, aucun prêtre, n'est en mesure d'interpréter un des songes de Pharaon qui voit défiler une suite de vaches grasses et de vaches maigres et on se souvient alors des talents de joseph et les intendants le font venir pour interpréter le fameux songe. Joseph va indiquer que le pays va connaitre sept années de prospérité puis sept années de famine et conseiller de se préparer à ces événements en construisant des entrepôts de stockage alimentés par un prélèvement obligatoire et en organisant la répartition des récoltes. Il est nommé premier intendant du pharaon et se met au travail, il va se marier, avoir deux enfants, ses prévisions se réalisent. Il devient très riche, très puissant, mais est toujours préoccupé par le sort de son père qui le croit mort depuis longtemps.

    Après les sept années de prospérité c'est la famine qui menace de l'autre côté du Sinaï où vivent ses frères et son père Jacob. Ses frères décident lors de se rendre en Egypte pour y acheter des provisions. Ils rencontrent Joseph sans d'abord le reconnaitre et celui-ci les convainc de retourner chez eux et de revenir avec son petit frère Benjamin et surtout son père Jacob, que Joseph est heureux de savoir vivant.

    Happy end donc pour cette trilogie remarquable qui se clôt avec la mort en paix de Jacob après qu'il ait bénit ses fils, sur ses terres..

  • Le Curry

    Rogan, Josh, Tikka masala, korma, vindaloo, jalfrezi, Byriani... il n'y a pas que le curry

    Mais qu'est-ce exactement que le curry? Ce serait un anglicisme dérivé du tamoul kari qui désigne la préparation des épices destinées à l'assaisonnement, un anglicisme devenu progressivement un terme générique pour tous les plats épicés nappes d'une sauce épaisse.

    Lizzie Collingham, historienne anglaise, dresse dans cet ouvrage un portait de la cuisine indienne à travers l'histoire. Les grands moghols, les portugais, la compagnie des indes, la colonisation britannique, les restaurants indiens de Londres, l'expansion de la cuisine indienne dans le monde, aux iles Fidji, en Californie, au Japon, la conquête de l'indépendance par le thé, le Chai, un livre érudit, très plaisant à lire  et qui invite à passer à la pratique avec par exemple les recettes de cuisine indienne popularisées de Madhur Jaffrey. Une élève d'art dramatique hindoue arrivée à Londres sans savoir faire la cuisine qui se fit adresser par sa mère des recettes qu'elle adapta aux ingrédients disponibles sur place puis qui fit des chroniques culinaires à New-York avant de créer une série télévisée avec la BBC qui connut un grand succès dans tout le monde de langue anglaise.

  • Les quatre saisons du fleuve Amour

    Ce premier livre de 2022 est superbe. Jean d'Albis, banquier de profession mais dont l'enfance s'est déroulée dans les milieux artistiques, porcelaine de Sèvres, restauration de tableaux anciens, séjours familiaux en Bohème, aux Etats-Unis,  en Extrême Orient, nous emmène à l'embouchure du fleuve Amour à la frontière entre Russie et Chine.

    On y suit la vie d'Orok, Dimitri, Lisaveta, Kalinka, Giliak, Nicolas, un peuple héritier des traditions des vieux croyants, des orthodoxes restés fidèles à l'orthodoxie d'avant 1666 et de l'animisme des Nivkhs

    On se love dans la peau d'un saumon qui remonte le cours de l'Amour, d'un chasseur, d'un ours, d'une biche, d'une conteuse, de l'héritière d'un soldat soviétique mort au combat.

    C'est tout simplement magnifique.

    Et je vous laisse méditer avec cet extrait : Il a appris que l'on reçoit à profusion en se contentant de peu. Il suffit de laisser les choses venir à soi et d'en goûter le sens, le temps qu'elles le veuillent bien. Il a aussi compris que rien ne sert de faire des réserves, rien ne sert d'accumuler. Car c'est dans l'action que se trouve la vie et non dans les greniers.

  • Voeux 2022

    Oui par instants la vie n'est pas sûre! Elle est même terrifiante! Oh pas pour la  plupart des européens. Mais que l'on pense à l'Éthiopie, au Yémen, à la Birmanie, à la Syrie, au Liban, à la Biélorussie, à Hong-Kong, la Centrafrique, aux chinois, aux russes, aussi et j'en oublie ...Il y a quelques années, on avait le sentiment que la liberté progressait dans le monde, que de nouvelles démocraties prenaient le pas sur les dictatures. Il n'en est rien!

    Alors en 2022 regardons autour de nous et chaque jour essayons à notre échelle de faire des projets, des actions qui contribuent à améliorer la condition et l'avenir de nos contemporains et de leur descendants.

    De belles lectures en 2022, une bonne santé et une belle humeur!

  • L'anomalie

    Incontestablement un livre brillant, plein d'allusions littéraires à côté desquelles je suis passé allègrement faute de discernement sans doute et de culture livresque certainement mais heureusement le net est là pour nous aider.

    Chacun sait aujourd'hui qu'il s'agit au départ d'une histoire d'avion, d'un vol AF Paris New-York qui atterrit deux fois en mars et en juin à la suite d'un énorme orage avec les même personnages.

    La première partie dépend chapitre par chapitre les huit personnages très dissemblables et reflets de la société contemporaine dont le destin va être affecté par cet évènement inouï.

    Dans la deuxième partie, on plonge dans la science-fiction avec le déroulement de la réaction des autorités américaines, et de la mobilisation de tout ce que nos sociétés modernes peuvent développer pour faire face à un évènement inattendu : FBI, secret, détentions arbitraire, psychiatres, intérêt national, complotisme...et dans la troisième partie chaque personnage doit voisiner, rencontrer son double, la difficulté étant que ce double a vécu trois mois de plus que l'original et a donc un vécu que l'autre n'a pas mais d'ailleurs quel est vraiment l'original, peut on survivre en sachant désormais ce que l'on va vivre dans les trois mois qui viennent etc.

    C'est donc brillant, j'ai beaucoup aimé le début, la présentation des personnages qui permet d'aborder les principaux débats qui agitent notre société et puis, et puis.. .l'interêt finit pas s'épuiser un peu, il y a sans doute trop de personnages, qui manquent peut-être de consistance pour que l'on s'y attache vraiment.

    A moins qu'il ne faille lire ce roman plusieurs fois, plus lentement, pour bien le déguster mais l'écriture vive fait qu'on a tendance à le lire comme un polar ce qui est sans doute dommage.

  • La volonté

    Très beau livre de Marc Dugain. Un ouvrage autobiographique et une histoire du XX siècle à la fois.

    Marc Dugain nous livre ici l'histoire de sa famille. Un grand-père maternel "gueule cassée", sa femme dévouée à jamais à son mari et sa fille unique. Des grands parents paternels, bretons, le père, marin au long cours, la grand-mère qui attend son mari, enclos dans la pauvreté, qui ne comprendront pas l'émancipation de leur fils cadet, le père de Marc, par l'école.

    Le père de Marc va être victime d'une attaque de polio adolescent, il parviendra, bien soigné par un médecin humaniste à marcher en boitillant, à faire de brillante études et deviendra ingénieur en physique nucléaire, spécialiste de l'étude des sols. Son épouse brillante scientifique également fera une carrière exceptionnelle dans l'industrie des eaux. Les deux tourtereaux dès les débuts de leur vie professionnelle s'expatrient en nouvelle Calédonie, puis au Sénégal où va naitre Marc Dugain, il veulent le meilleur pour leurs enfants, jusqu'à l'incompréhension devant ce fils qui ne leur ressemble pas, tête en l'air, poète...

    Tout au long de ce récit Marc Dugain nous raconte en parallèle de la saga familiale l'histoire de la France au XX siècle, la grande guerre, la crise de 29, la montée du fascisme, la défaite de 1940, la décolonisation. Ce siècle Marc Dugain lui règle son compte, il ne l'aime pas. toutes ces erreurs, ces dérives, ce capitalisme triomphant, et pour finir le réchauffement climatique. Heureusement, il y a des individus courageux, qui parviennent à force de volonté à se frayer un chemin exemplaire. De vrais humanistes. L'humanisme une valeur à réhabiliter en ces temps de cynisme généralisé.

     

  • La petite lumière

    Traduit de l'italien. Dès la première phrase, prémonitoire, tout est dit : "Je suis venu ici pour disparaitre, dans ce hameau isolé et désert dont je suis le seul habitant."

    Dès lors le narrateur va nous plonger dans un univers onirique, où il est beaucoup question de feuillage, d'arbres, d'hirondelles, de chauve-souris et même d'extra-terrestres.

    Et le sois, de sa maison, il apercçoit sur l'autre versant de la vallée une petite lumière qui brille toute la nuit plus ou moins intensément. 

    notre héros va partir à la recherche de cette lumière et découvrir un petit garçon, en culotte courte, qui vit seul, va à l'école du soir...très bien élevé, bien organisé ...

    Très énigmatique.

    On se laisse porter par cette histoire délicate, très bien menée, très attachante, luxuriante, angoissante aussi.

     

  • Les pierres sauvages

    Les pierres sauvages est le titre de l'ouvrage écrit par Fernand Pouillon (1912-1986) lorsqu'il était en prison, accusé de malversations financières de ses partenaires dans l'exercice de son métier d'urbaniste et architecte, il sera amnistié par Pompidou un peu plus tard et recevra la légion d'honneur de Mitterand. Quoi qu'il en soit il a été un grand architecte, précurseur du développement durable, il préférait la pierre au béton.

    Avec Les pierres sauvages, qui est sans doute un auto portrait, Fernand Pouillon relate sous la forme du journal imaginaire du moine Guillaume Batz, les péripéties de la maitrise d'oeuvre de la construction de l'Abbaye du Thoronet dans le Var, une des trois merveilles de l'art cistercien en Provence avec Sénanque et Silvacane.

    C'est merveilleux! Quoi de plus beau que ce construire une abbaye au XII siècle. Il faut tout faire : extraire les pierres, les tailler, les affecter en fonction de leur qualité à tel ou tel usage, construire les outils, acheminer les autres matériaux, les vivres, diriger la communauté des moines et des convers, faire les plans, convaincre l'Abbé de l'Abbaye de Florielle, l'abbaye mère, de ses choix, arbitrer les conflits entre les personnes, faire face aux accidents du travail, parfois mortels, à sa propre santé, ne pas se décourager.

    Un livre magnifique qui ne laisse rien paraitre des convictions religieuses ou philosophiques de Fernand Pouillon.