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Une enfance à La Chaise-Dieu

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Jean-Luc Bayard, auteur de P.O.L nid d'espions présente son livre dans un entretien paru dans Libération et à cette occasion, évoque son enfance à La Chaise-Dieu. C'est très émouvant. La totalité de l'entretien est  ici, la partie relative à La Chaise-Dieu dans "lire la suite". 

1973 est une date importante dans le livre : Harry Mathews entre à l’Oulipo. Perec commence à rassembler ses souvenirs pour Je me souviens. Que faisiez-vous cette année-là ?

J’avais 14 ans et je quittais mon village, La Chaise-Dieu, pour entrer au lycée au Puy-en-Velay. A ce moment-là, le dessin compte davantage pour moi que la littérature, mais j’aime Baudelaire, comme beaucoup d’ados ; les Hauts de HurleventRamuntcho, de Loti, et le Livre de Monelle, de Marcel Schwob, une lecture décisive, parce qu’en lisant plus tard les Nourritures terrestres, je découvre les passerelles qui relient ces deux livres et les livres en général. Le chemin de la lecture est celui qui va d’un livre à l’autre.

Aimez-vous la Chartreuse de Parme qui est, à la fin du livre, «le centre de l’étoile, à partir duquel tout s’éclaire» ?

Je ne sais pas. J’ai un rapport difficile aux grands livres. Je suis un lecteur des contemporains, Cadiot, Hocquard, Bernard Noël, Danielle Mémoire, plus loin dans le temps Blanchot et Perec : ils me donnent la clé et je fais la marche à reculons. Je fonctionne sur un mode connectique, par rapprochements. Je vais lire la Chartreuse parce que j’ai lu 53 Jours de Perec.

On lisait dans votre famille ?

Non, chez nous il y avait un dictionnaire et un roman. Bizarrement, c’était le quatrième tome des Jeunes Filles, de Montherlant, les Lépreuses. Mon père avait une boucherie-charcuterie, ma mère travaillait avec lui. Mon premier métier, c’est garçon-boucher. Je suis né dans une maison à 1 100 mètres d’altitude, dans ce village blotti autour d’une église-tombeau, fondée au XIe siècle par le neveu de saint Odilon dans la plus pure tradition bénédictine. Et l’un des moines de cette église est le pape Clément VI. Il a décidé de faire de cette église son tombeau. La Chaise-Dieu, c’est un pape pour 900 habitants. Il y a des bois, de la neige, deux saisons, l’été qui dure trois mois, l’hiver qui dure neuf mois. J’ai eu la chance de naître dans cette proximité avec la nature, de sentir un contact avec les commencements de l’humanité. Le festival de musique classique de La Chaise-Dieu fut créé en 1966 ; j’avais 7 ans.

Grandir à La Chaise-Dieu, c’était faire l’expérience de la grotte de Lascaux : éprouver la tension entre l’œuvre d’art par excellence, Rhapsodie hongroise jouée par Cziffra père et fils, et les forêts d’épicéas, la rivière, le jardin ; avoir l’intuition que le théâtre de l’humanité, c’est à la fois l’attente des écrevisses et Cziffra. Mon père aimait chasser, pêcher, il m’a appris l’attente ; ma mère m’a appris le travail. Mes parents n’ont jamais pris de vacances, mais qu’est-ce que ça veut dire, des vacances, pour un homme préhistorique ? Ils m’ont aussi appris la séparation : «Va en ville, mon fils.»

Commentaires

  • Bonjour,
    En lisant votre missive je viens de traverser la place de La Chaise Dieu, de descendre les marches qui mènent à la boucherie, d'acheter de la saucisse qui serait mise à cuire des heure durant et embaumait la cuisine, de revivre ces joies simples mais riches qui forgent les souvenirs de la jeunesse.
    Et puis il y avait aussi cette abbaye majestueuse, la salle des échos où nous chuchotions, enfants aux quatre coins, deux par deux....Et, surtout il y avait Bonnefond, la maison construite par Jean Claude, le mari de Mémé, cette maison magnifique, tournée vers le sud, lumineuse, où nous étions si heureux pendant les vacances.....

  • j'ai l'âge de jean-luc; parisienne je passais avec mes parents et mon frère le mois d'aout et une semaine à Paques tous les ans à la Chaise Dieu, jusqu'à mes 18 ans; au début des années 70, il y avait 4 boulangeries, 4 boucheries, 4 bars pour un peu plus de 1000 habitants; balades en vélo puis mobylette, promenades en forêt avec cueillette des champignons, baignades à Malaguet puis au plan d'eau quand il fut créé... et surtout des après midis entières à lire dans le jardin,,,,à Paques, souvenir d'une semaine de ski de fond....début des promenades à cheval avec les branches de sapin nous cinglant le visage quand on galopait, inconscients,,,apprentissage du tennis avec l'ouverture du VVF,,,

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