Kampuchea

Gémir, pleurer, prier est également lâche
Fais énergiquement ta longue et lourde tâche
Dans la voie ou le sort a voulu t'appeler
Puis, après, comme moi, souffre et meurs sans parler
Ces alexandrins, dernière strophe de La mort du Loup d'Alfred de Vigny, Douch, responsable de la disparition de 12000 personnes dns le camp 21 à Pnom Penh les a prononcés à l'ouverture de son procès.
Ces vers il les avait appris au Lycée Français. et un de ses chefs, Khieu Samphân dira : "Le premier ministre Pol Pot et moi-même sommes profondément imbus de l'esprit français, du siècle des lumières, de Rousseau...". Rousseau, il est vrai a écrit " Nous les contraindrons d'être libres..."
Avec Michel Deville, auteur depuis de La peste et le choléra, prix Médicis 2012, on remonte le cours du Mékong et au fil du voyage apparaissent de façon non chronologique les figures d'Henri Mouhot, parti à la chasse aux papillons et qui consigna le premier les vestiges des temples d'Angkor dans ses carnets en 1860. on explore aussi la péninsule avec Auguste Pavie, Francis Garnier qui le premier remonta entièrement le cours du Mékong, Francis Garnier dont les cendres reposent en haurt d'une colonne à l'angle de la rue d'Assas et du boulevard Saint Michel. On croise aussi Malraux, Loti, Lord Jim, Conrad, mais aussi par association d'idée Brazza et Mr Livingstone I suppose... Sihanouk bien sûr, les chemises rouges en Thaïlande, Dien Bien Phu, Ho Chi Minh, Giap...et les millions d'anonymes qui perdirent la vie victimes des khmers rouges, des anonymes qui pour reprendre l'xpression de Deville "n'avaient pas choisi leur affectation". On choisit rarement son affectation.
Ce n'est pas un roman. J'avais beaucoup aimé Le rapport de Brodeck et Les âmes grises. Ici ce sont des souvenirs d'enfance, pour l'essentiel, déclinés, en deux ou trois pages, par ordre alphabétique, à partir du parfum qui les caractéristise. Parfum au sens large, car il peut s'agir de puanteur.
J'ai d'abord lu le livre, je ne crois pas l'avoir lu autrefois, et puis j'ai été voir le film. Difficile de se rendre compte de ce fait de la qualité du film car j'étais encore tout imprégné de la force du roman de Mauriac, un roman qui n'a pas pris une ride. J'en devinais toutes les répliques.
C'est sans aucun doute un bon prix Goncourt. Je l'ai acheté avant que le prix ne soit décerné et cela ne m'a pas dissuadé de le lire. Il y a dans ce livre le portrait ou le parcours de personnages appartenant à trois générations issues d'un petit village de l'Ile dite de beauté.
"Si tu veux dire la vérité, assure-toi que tu as un bon cheval".
