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Livre - Page 13

  • Things fall apart ou Tout s'effondre

    Cet été Barack Obama a effectué un voyage en Afrique et à cette occasion il a mentionné dans une entretien les livres qu'il a lus pour préparer ce voyage : https://www.facebook.com/barackobama/posts/10156007456406749

    37781.jpgC'est à cette occasion que j'ai découvert Chinua Achebe, un auteur nigerian qui a écrit "Things fall apart" dans les années cinquante. Un auteur méconnu par la francophonie qui n'en parle jamais, mobilisée qu'elle est sur les auteurs africains francophones. Et pourtant "Le Monde s'effondre" ou "Tout s'effondre" dans la dernière traduction est un livre formidable qui décrit avec talent le mode de vie d'une tribu au Nigeria avant l'arrivée des blancs. La vie villageoise, les dieux, les croyances, parfois d'une cruauté inouïe comme celle d'abandonner dans la forêt tous les jumeaux perçus comme des anomalies,  l'exil et le bannissement des fauteurs de troubles, les mariages forcés, la virilité exacerbée des hommes, mais aussi beaucoup d'amour, de solidarité. La seconde partie décrit l'arrivée des premiers missionnaires, la confrontation des croyances, la construction des premières églises, les premières conversions, les conflits au sein des familles, puis enfin la colonisation proprement dite dans la troisième partie avec l'instauration du pouvoir de Londres, et de sa justice, l'incompréhension des villageois les plus attachés à leurs traditions et l'adaptation des autres à la nouvelle donne. Rien n'est simple.

  • Un été avec Homère

    Le livre de Sylvain Tesson, Un été avec Homère, qui reprend ses chronique diffusées sur France Inter l'an dernier est un ravissement, un vrai plaisir de lecture. 

    J'ai lu l'Iliade et l'Odyssée en Pléiade il y a quelques années. Je me souviens d'une lecture un peu difficile de l'Iliade, beaucoup plus aisée de l'Odyssée. La lecture de l'ouvrage de Tesson, elle, est limpide. Après le résumé des deux ouvrages, Sylvain Tesson en fait le commentaire avec des allers et retour sur le pourquoi dans le contexte de l'époque et sur l'actualité d'Homère, aujourd'hui, après le christianisme, l'Islam, bref les monothéismes.

    La thèse de Tesson qui ne croit pas à l'au delà quel qu'il soit mais se contente du ravissement que lui procure le monde tel qu'il est est qu'Homère est actuel parce que rien n'a changé sous les cieux depuis que l'homme est sur terre. Il y a la guerre, irresistible, et l'homme qui balance éternellement entre chercher le repos, revenir chez lui, retrouver son foyer et puis courir l'aventure, découvrir l'inconnu.

    Et ce n'est pas Internet qui va changer cela!

  • Pastorale américaine

    Après la mort de Philip Roth, j'ai décidé de combler une lacune. J'avais lu en son temps La Tâche, et je crois bien que c'est tout et j'ai donc entrepris d'aborder La pastorale américaine, le début de la fameuse trilogie avec j'ai épousé un communiste et donc La tâche.

    J'avais lu La Tâche en français. J'ai lu American pastoral dans sa version originale sur une liseuse même si la Grande Librairie m'a convaincu que Josée Kamoun est une grande traductrice. De ce fait j'ai sans doute éprouvé quelques difficultés pour cette lecture toujours moins aisée lorsqu'on s'éloigne de la langue maternelle mais il faut bien essayer de progresser.

    Dans ce roman couronné de très nombreux prix Roth se complait à nous peindre l'envers du rêve américain. Le roman retrace la vie de Seymour Levov, ancien athlète, juif, entrepreneur, à la suite de son père, dans la ganterie, entrepreneur à succès, il a tout pour réussir une très belle villa sur un grand domaine, une épouse, d'origine irlandaise et non juive, ancienne lauréate d'une concours de beauté local et une fille Merry.

    Mais derrière cette façade de l'Amérique heureuse des année soixante, il y une faille, c'est Merry. Merry, qui bégaie, Merry qui se révolte, Merry qui devient avant même d'être majeure une terroriste, Merry qui pose une bombe pour protester contre la guerre du Viet-Nam, Merry à l'origine de la mort d'un honnête homme... Sa mère qui plonge dans la dépression, Merry qui disparait dans la clandestinité, et son père qui refuse de voir la vie en face pendant plusieurs années, qui la cherche et finira par la retrouver, sa femme entre temps aura refait son corps et sa vie, vendu la maison familiale... Je ne relève pas tout, le roman à bien des côtés Thriller, le scénario est quelque peu diabolique...

    Est ce que cela peint vraiment la société américaine des années soixante? J'ai un peu de mal à le croire, tous les malheurs de l'Amérique sont trop concentrés sur une seule famille. Trop c'est peut-être trop, mais je m'incline bien volontiers devant la critique...

  • Lanzmann et Veil

    Nous sommes le 5 juillet.

    J'écoute à la radio Nuit et brouillard de Jean Ferrat : "ils étaient des milliers ils étaient vingt et cent, nus et maigres, tremblants..."

    Cette chanson, je l'ai entendue dimanche dernier, en direct, devant l'entrée du jardin du Luxembourg, face au Panthéon, par une chorale, lors du transfert de Simone et Antoine Veil au Panthéon (photo). J'avais les larmes au yeux.

    Aujourd'hui, ClaudeLanzmann est décédé, France Inter a bouleversé ses programmes, c'est justifié et réconfortant pour notre société.

    bm_484_1738057.jpgClaude Lanzmann est bien sûr l'auteur de Shoah, un film de neuf heures, mais l'oeuvre de Lanzmann c'est toute sa vie, 92 ans de vie, active, de la résistance avec son père dans les maquis de Brioude à la sortie de son dernier film Quatre soeurs ces jours-ci.


    Si vous ne l'avez pas encore fait, lisez Le lièvre de Patagonie, un livre qu'il n'a pas écrit mais entièrement dicté, un livre formidable qui retrace sa vie, la Résistance, la Corée du nord, l'Algérie, Les temps modernes, Sartre et Beauvoir, Shoah, Judith Magre, une de ses épouses, née en 1926 que vous pouvez encore aujourd'hui voir au Théâtre de Poche à Montparnasse.

  • Le gang de la clef à molette

    Edward Abbey est surtout connu pour son roman Désert solitaire et c'est en allant acheter ce ivre que la libraire de chez Mollat m'a aussi convaincu de lire Le gang de la clef à molette et c'est par ce dernier que j'ai commencé, je lirai plus tard le Désert solitaire.

    Dans les deux cas c'est un roman sur l'écologie et la menace qui pèse sur les déserts de l'ouest américain. Ici quatre individus, quatre insoumis ,se coalisent pour saboter les infrastructures qui défigurent la nature. Il y a un jeune vétéran de la guerre du Viet-Nam, une petite brute inculte mais déterminé et toujours prêt à la bagarre, un mormon polygame spécialiste de la descente des rivières, un chirurgien blasé d'une quarantaine d'année et sa maitresse, une belle rousse, indépendante.

    Ils s'en prennent aux ponts, aux chemins de fer, démontent, sabotent, incendient et bien entendu sont poursuivis par les autorités au sein de canyons, désespérément secs, avec des falaises de dizaines de mètre de haut...Il y a de la bagarre, des hélicoptères, la faim, les longues marches assoiffés...

    S'en sortiront -ils? il y a du suspense, de très belles pages sur la faune et la flore, un très beau vocabulaire, une ode à la nature, une passion pour l'écologie...

    Un livre prémonitoire paru pour la première fois aux USA en 1975.

  • Compagnon de route

    Sur le Camino francés, entre Leòn et Santiago, effectué en solitaire j'avais emmené ma liseuse avec quelques ouvrages de Jean Rolin qui s'est révélé être un excellent compagnon de route.J'avais déjà lu Savannah avant de partir et Le traquet kurde, son dernier ouvrage, un peu auparavant (cf. Chronique du 24 février).

    Jean Rolin comme il l'explique lui-même n'écrit pas de romain, ni d'essai, il écrit tout simplement, il fait des trucs à partir de ce qu'il décide de vivre.

    Dans Savannah, il décrit le voyage mémoriel qu'il fait sur les traces  d'un séjour en Louisiane qu'il avait effectué avec Kate, la fille de Jane Birkin, suicidée depuis, avec laquelle il vivait à l'époque. Kate avait enregistré avec son téléphone des petites vidéos de ce séjour et Jean Rolin essaie tout simplement de refaire au plus près les visites, les circuits, les rencontres... C'est très attachant.

    Dans Terminal frigo, Jean Rolin part à la découverte des ports français. Ayant eu à connaitre plusieurs de ces ports dans ma vie professionnelle, j'ai évidemment trouvé ce livre très attachant, en particulier ce qui se passe à Nantes et à Dunkerque au moment de la Réforme du statut des dockers, les dissidences de la CGT, les intimidations...cette histoire a encore aujourd'hui des retentissements et certains acteurs cités dans l'ouvrage sont toujours actifs. les descriptions des installations portuaires du port de Bordeaux sont très biens vues, et malheureusement toujours actuelles...

    Dans Ormuz, Rolin nous promène dans le fameux détroit, lieu stratégique s'il en est, en compagnie d'un individu qui se prétend athlète de haut niveau et qui veut traverser le détroit à la nage. Il charge l'auteur de faire des repérages qui ne manquent pas d'inquiéter l'Iran, les émirats... on voyage, c'est bien. Quant au succès de la traversée, je vous laisse le suspens...

    Enfin dans La Clôture, Rolin entrecroise la biographie du Maréchal Ney, dont la statue est à côté de la Closerie des Lilas, pas très loin du lieu de son exécution, et le monde interlope situé entre les portes de Saint Ouen et de La Chapelle. Ouvrage écrit avant la crise actuelle des réfugiés mais des réfugiés, des SDF, et des prostituées, il y en déjà qui habitent dans des piliers du Boulevard périphérique, et eux aussi, Rollin nous en livre la biographie. C'est parfois à couper le souffle toute cette misère à nos portes qu'on refuse de voir et que l'on a renoncé à combattre.

  • Jan Karski

    Jan Karski (1914-2000) est connu comme l'auteur de rapports psur l'extermination des juifs en Pologne à l'attention des gouvernements britannique et américain dès 1942, rapports qui lui ont été demandés par le gouvernement polonais en exil dans le cadre des ses activités de résistance.

    Claude Lanzmann a fait connaitre Karski avec son film Shoah puis avec le rapport Karski, dans lequel il livre la totalité du témoignage qu'il a recueilli.

    Yannick Haenel a publié Jan Karski et obtenu pour ce roman le prix Interallié.

    Arthur Nauzyciel a adapté ce livre au théâtre en insistant comme Haenel sur le silence de Karski pendant 35 ans. On voit donc successivement une relation du témoignage de Karski dans Shoah, puis un résumé des rapports de Karski lu par Marthe Keller en off, illustré en vidéo par des plans de camps et enfin, Jan Karski lui-même qui témoigne, c'est l'aspect le plus romancé. Une danseuse à la fin du spectacle exprime la souffrance des corps et la mort.

    Jan Karski a été un témoin puis s'est tu pendant 35 ans, professeur aux Etats-Unis, jusqu'à ce qu'il réapparaisse dans Shoah, la gorge nouée, à peine capable de s'exprimer lui qui a vécu toute ses années obsédé par l'incpréhension dont il estime avoi été l'objet, convaincu que ce n'est pas l'Allemagne nazie qui a éliminé les juifs mais le monde entier, y compris les alliés qui se seraient montrés à tout le moins des complices passifs de la shoah. Sur ces points la querelle entre historiens reste vive et on pourra se reporter à Internet pour en prendre la dimension.

    Deux heures quarante de théâtre donc, hier à Bordeaux deux heures quarante de monologue, certains spectateurs se lassent rapidement et quittent la salle, mais la très grande majorité reste, écoute ce témoignage bouleversant, et s'interroge sur sa transposition aujourd'hui : qu'est ce que nous refusons de voir aujourd'hui? Telle est la question.

    A voir au TNBA jusqu'au samedi 28 avril et en tournée.

  • Enlightenment Now de Steven Pinker

    Pas encore traduit en français mais très facile à lire. 600 pages dont 75 de notes et beaucoup de graphiques pour montrer que malgré le pessimisme ambiant il y'a toujours et encore des raisons d'espérer, à condition de persévérer dans esprit des lumières.

    Steven Pinker montre qu'il faut s'appuyer sur la raison, la science et l'humanisme, les trois moteurs qui n'ont cessé de faire progresser l'humanité.

    Steven Pinker aime quantifier, une antenne ne fait pas une tendance, il faut toujours essayer de mesurer pour comprendre, c'est d'ailleurs la devise de l'insu.

    Et Pinker s'attache à montrer que tout va mieux  en termes d'espérants" de vie, de santé, d'alimentation, de richesse, d'inégalités, d'environnement, de paix, de sûreté, de terrorisme, de démocratie, de droits, de savoir, de qualité de la vie, de bonheur, de menaces existentielles...

    Regardons en arrière, objectivement et allons de l'avant muni de notre capacité à comprendre, à progresser, à fraterniser, c'est la leçon optimiste de ce livre.

    Ceux qui ne lisent pas l'anglais ou ne le souhaitent pas peuvent lire l'avant dernier ouvrage de Steven Pinker, traduit en français sous le titre : "la part d'ange en nous" où il démontre la diminution de la violence sous toutes ses formes sur longue période

  • Stoner de John Williams

    Voici un livre paru en 1965, pas du tout d'actualité mais toujours actuel.

    Je l'ai découvert sur Internet en tombant par hasard sur une critique d'Une Vie entière de Seethaler dans l'Irish Times, vous voyez le détour? (cf. Chronique du 14 février 2018).

    Mais un détour qui en vaut la peine. Dans les deux cas le roman est le récit de la vie du personnage principal, et dans les deux cas c'est une vie ordinaire, marquée par beaucoup d'échecs.

    William Stoner, né à la fin du XIX siècle dans le Missouri, dans une famille d'agriculteurs pauvres, se destine initialement à l'agriculture, il va à l'université, en section agriculture, hébergé chez des cousins éloignés pour lesquels il travaille la terre lors de ses temps libres, logé dans un recoin du grenier.

    Et puis dans son cursus, il découvre la littérature, il est émerveillé, c'est une révélation. il abandonne l'agriculture, la perspective de reprendre la ferme de ses parents, réussit ses études, devient professeur dans son université de Columbia ou il est coopté, ce qui lui évite d'avoir à se demander ce qu'il va faire de sa vie.

    Sa vie va apparemment être une suite d'échecs ; il se marie mais réalise au bout d'un mois que ce mariage sera un échec, il va cohabiter jusqu'à la fin de ses jours avec une femme qui lui mènera la vie dure, l'éloignera de sa fille, le relèguera au fond de la maison... A l'université, trop intègre, il se fera un ennemi de son chef de département ce qui lui interdira tout promotion. il va connaitre un grand amour avec une de ses étudiantes mais ils décideront de mettre fin à cette ydille trop compliquée à assumer...

    Et pourtant, Willy Stoner a t-il été aussi malheureux qu'on peut le penser? Sans doute pas. il a eu un beau métier, a eu plaisir à enseigner la littérature anglaise, à dialoguer avec ses étudiants, a vécu une belle histoire d'amour...

    C'est quoi le bonheur?

    J'ai lu l'ouvrage en anglais, sur ma liseuse. Très facile, l'écriture est limpide, le vocabulaire accessible. Il existe une traduction en Français d'Anna Gavalda, chez Babélio.

  • Une vie entière

    Voilà un livre formidable, dans la lignée des vies minuscules de Pierre Michon

    Robert Seethaler nous avait déjà enchanté avec Le tabac Tresniek, il récidive ici d'une tout autre manière.

    La vie d'Andreas Egger est simple. C'est un montagnard, né en 1898, abandonné très jeune par une mère décédée de ces excès, recueilli par un oncle fermier en montagne qui va le maltraiter au point de le rendre boiteux. A sa majorité Egger va le quitter et partir travailler, pas dans les champs, il ne veut pas regarder vers le bas, mais vers le haut, et donc dans la société qui construit un téléphérique, apporte la modernité.

    Andreas rumine beaucoup ses pensées, toujours pour finir par agir, survivre, se démener, trimer, sans se plaindre. il n'est pas très adroit avec les femmes, mais ils aime Marie, et va finir après beaucoup d'approches empruntée par l'épouser et construire une petite maison , toute simple. et puis vous verrez...

    Sachez encore qu'en 1942, il va être envoyé par les nazis sur le front du Caucase, subir la torture, la faim, toujours stoïque, jamais révolté, résigné peut-être, mais ce n'est pas le bon mot.

    Ce sera sa seule sortie de sa vallée avec celle à la fin de sa vie ou il prendra l'autobus pour aller découvrir son trajet pour en revenir aussitôt voyant qu'il n'y avait rien à voir...

    Une vie entière, toute simple, intérieure, une grande capacité d'adaptation à son environnement, le souvenir de sa bien aimée, un être profondément humain.