La Grande Arche de Johan Otto Von Spreckelsen
On ne sait pas trop comment qualifier l'ouvrage de Laurence Cossé consacré à La Grande Arche. Prudemment elle l'a sous titré roman mais c'est plutôt une enquête, un récit même s'il y a sans doute deux ou trois détails de la narration qui ont été inventés.
En tous cas c'est un livre passionnant qui raconte la genèse de ce monument. L'ascension et la chute de son architecte, Johan Otto von Spreckelsen, un artiste intégre qui avait tout juste construit sa maison et quatre petites églises au Danemark et qui emporte le concours organisé pour doter la Tête-Défense d'un monument qui doit être inauguré pour le bicentenaire de la révolution.
Ce concours il l'emporte avec un dessin, une idée, de laquelle il ne voudra pas démordre au fil du chantier malgré la multiplicité des contraintes techniques.
Malgré aussi les revirements permanents de la maitrise d'ouvrage dont on ne sait jamais vraiment entre les mains de qui elle est : du président de la République, François Mitterand, de la Caisse des dépôts et de son omnipotent Directeur général Robert Lion, d'Alain Juppé, ministre du budget pendant la cohabitation de 1986 à 1988.
Spreckelsen ne comprendra jamais les français. Au Danemark, un contrat est un contrat, on ne revient pas sur un accord. En France, c'est l'improvisation permanente, on ne tient pas ses engagements... Il démissionnera avant la fin du chantier laissant à Andreu l'architecte d'Aéroports de Paris, de l'Opéra de Pékin... le soin de terminer un ouvrage qu'il n'aura pas le temps de reconnaitre puisqu'il décédera en 1987.
La construction de l'Arche révèle une partie du mal français. A quoi sert-elle d'ailleurs? Y avez vous rencontré des occupants heureux? Quid des idées de fraternité, de centre international de la communication qui prévalaient au moment du projet. On parlait alors d'arche de la fraternité.
Laurence Cossé nous montre bien l'envers du décor fastueux de l'Arche, de l'arc de triomphe de Spreckelsen comme on dit au Danemark.
Et si vous allez au Danemark, il faut aller visiter les églises catholiques à Esbjerg et Hvidovre et les temples protestants de Vangede et Stavnholst pour réellement comprendre Spreckelsen et son souci de l'élégance et de la perfection.