A l'heure où toute la classe politique, ou presque, se convertit à l'écologie, il n'est pas inutile de quantifier un peu les défis. C'est ce qu'a fait Nicholas Stern, dans une publication intitulée A blueprint for a safer planet qui reprend pour un public élargi les analyses et les conclusions de son rapport au gouvernement britannique sur le changement climatique, rapport qui fait autorité aux côtés des travaux du GIEC (groupe d'experts intergouvernemental sur le climat), prix nobel de la paix 2007.
Nicholas Stern a été économiste en chef à la Banque mondiale et est également l'auteur d'un rapport sur l'Afrique à l'attention du G8 de Greenagles en 2005. Il considère à juste titre que l'humanité est confrontée à deux défis majeurs : la lutte contre la pauvreté et le changement climatique et qu'apporter une solution à l'un c'est aussi apporter une solution à l'autre.
Que disent les chiffres? La concentration des gaz à effet de serre se mesure en ppm (parties par millions). Actuellement, la concentration de CO2e, c'est à dire le CO2 et les autres gaz à effet de serre équivalents est évaluée à 430 ppm, soit 430 molécules de CO2e pour un million de molécules d'air. En 1850, cette concentration était de 285 ppm environ.
Aujourd'hui, le consensus est que sans changer nos comportements nous serons autour de 750 ppm en 2100. A ce niveau, la probalité d'une élévation de la température moyenne du globe de 2 degrés serait de 100%, de 4 degrés de 82 % de 5 degrés de 47 %, de 6 degrés de 22%.
Si, au contraire, on parvient à limiter durablement la concentraton de gaz à effet de serre à 500 ppm, la probabilité d'une élévation de la température de deux degrés est encore de 78 %, mais celle d'une hausse de 3 degrés tombe à 18 %.
Certes l'homme a déjà survécu à d'importants changements climatiques, mais à quels coûts? La grotte Cosquer, près de Marseille, habitée il y a 20000 ans, au moment de la dernière glaciation, et qui se situe à 140 mètres sous le niveau actuel de la mer, donne une idée de l'ampleur des conséquences que peuvent avoir les changements importants de température.
D'où l'enjeu de la prochaine conférence de Copenhagen fin décembre pour trouver une suite au protocole de Kyoto.
Nicholas Stern expose très bien les enjeux et les solutions en termes de réduction des émissions et d'adaptation au changement climatique. L'enjeu est de trouver un accord global entre les individus, les entreprises, les Etats, les pays développés, les pays émergents, les Etats-Unis, l'Union européenne, la Chine... où chacun trouve son compte afin de contribuer à sa mise en oeuvre. Dans ce domaine il n'y a pas de frontière, le climat est un bien public global et il faut trouver une réponse, un deal et un leadership global.
Les solutions existent : il faut mettre en oeuvre toutes les technologies disponibles, en faire émerger de nouvelles, pour promouvoir une croissance peu consommatrice en énergie et en carbone : nucléaire, captage et stockage du CO2, énergies renouvelables, économies d'énergies, aide aux pays émergents pour revenir sur la déforestation... Il y a là en pleine crise économique mondiale les éléments d'une relance globale pour une croissance soutenable à long terme. Ces investissements doivent jouer le rôle dévolu depuis la révolution industrielle au chemin de fer, à l'électricité, à l'automobile, aux nouvelles technologies. Taxes, marchés de droits à polluer, règlementations : tous les outils de la politique économique doivent être mobilisés pour orienter les décisions des acteurs économiques et pallier cette gigantestque défaillance du marché qui ne prend pas en compte dans les prix d'aujourd'hui les coûts du changement climatique de demain
A nos dirigeants d'exercer leur rôle de leader, de voir à long terme, à nous de les y contraindre!