Magellan
Lors d'un voyage au Brésil, Stefan Zweig eut honte. Il naviguait depuis quelques jours sur un paquebot luxueux avec piscine et restaurants, télégraphe et air conditionné, et il s'ennuyait. C'est alors qu'il eut une pensée pour ceux qui les premiers s'aventurèrent sur l'Atlantique et qu'il s'intéressa aux navigateurs de la renaissance.
D'où ce Magellan qui nous raconte l'épopée de cette flotte de cinq navires le San Antonio, le Trinidad, le Concepcion, le Victoria et le Santiago qui quittent le port de Séville le 10 août 1519 pour se rendre aux Moluques, les iles des épices, en naviguant plein ouest. trois ans plus tard un seul navire reviendra avec seulement dix-huit hommes à bord.
Et sans son amiral Fernao de Magalhaes, portugais d'extraction modeste au service de la couronne espagnole, de celui qui allait devenir Charles Quint. Sans son amiral qui trouve la mort un peu bêtement dans une bataille qu'il a lui même provoqué avec un petit roi d'une ile des Philippines.
La biographie est complète, des premières armes de Magellan aux Indes comme navigateur jusqu'au retour de la Victoria à Séville.
Zweig montre très bien au début de l'ouvrage combien la navigation a connu une révolution en un siècle : en 1418 les portugais atteignent péniblement Madère et un siècle plus tard Magellan fait le tout du monde.
Le Portugal et l'Espagne étaient des pays à la périphérie de l'Europe, à l'écart de la route des épices contrôlée par les musulmans et Venise et ils mettent en place de nouvelles routes en quelques années et se créent des empires.
L'ouvrage de Zweig montre surtout que la détermination est essentielle à la réalisation d'une idée. Son tour du monde, Magellan l'a conduit à son terme envers et contre tous et d'abord contre ses quatre adjoints espagnols et ses équipages qui n'ont pas manqué de plaider sans relâche pour faire demi tour devant la difficulté de trouver un passage au delà de l'Atlantique. Méticulosité, fermeté, ruse, détermination, droiture...
Accessoirement on notera que le prix des épices rapportées a permis de rembourser l'investissement de départ, du moins si l'on fait abstraction des deux cents et quelques marins morts pour l'essentiel de faim, de soif ou de froid, mais à cette époque que valait la vie d'un marin?