GR 65 - Le chemin de Saint Jacques : une bulle confortable
Le chemin de Saint Jacques de Compostelle est en passe de devenir un petit phénomène de société. Les statistiques manquent mais il semble bien que chaque année 10 000 à 15 000 pélerins emprunteraient le GR 65 qui conduit du Puy en Velay à Saint Jean Pied de Port. Les témoignages laissent penser qu'il faut multiplier par 10 ce chiffre sur la partie espagnole El camino frances, et peut être par 100 pour les derniers 100 km qui sont indispensables à l'obtention de la fameuse Compostella, ce certificat qui atteste de la réalité du pélerinage.
A raison d'une semaine par an, le randonneur que je suis est parvenu à Aire sur l'Adour au mois d'août avec l'espoir d'atteindre les Pyrénées l'an prochain.
En apparence, on rencontre sur le chemin différentes catégories de Pélerins. La Maison du Pélerin à Aire sur l'Adour en a vu passer près de 7000 depuis son ouverture en 2004. Il y autant de femmes que d'hommes, une très grande majorité de français, suivis par les allemands, les suisses et les néerlandais, souvent venus à pied de leur pays. En mai et juin, on rencontre beaucoup de jeunes retraités, qui vont ou envisagent d'aller jusqu'à Saint Jacques avec comme objectif d'y arriver le 25 juillet, fête de l'apôtre. L'été, on trouver plus de personnes en groupe, qui font le chemin par morceaux faute de pouvoir y consacrer deux mois d'affilée.
Cette diversification apparente masque en fait une très grande homogénéité des marcheurs. Bien sûr, il y a les vrais pélerins, animés par leur foi ou soucieux de la conforter, il y a les simples randonneurs, heureux de découvrir la France à pied...mais au fond tous ces marcheurs pour l'essentiel appartiennent aux classes sociales moyenne ou aisées. Il y a peu d'ouvriers, on est très loin de la France black, blanc, beur...
Tout au long du chemin, le pélerin est à peu près certain de ne rencontrer que des semblables ou presque, la rencontre avec l'autre si célébrée par les dévôts du pélerinage est à peu près sans risque. Le pélerinage est une période de retrait du monde ou plutôt une plongée dans un mode révé, un monde sans conflit, soucieux de l'environnement, de spiritualité, de convivialité, de fraternité...
Le monde réel est là à côté du chemin mais on ne le voit pas, on l'entr'aperçoit avec dédain au détour d'une traversée de ville, le plus vite possible.
Oui, le Chemin de Saint Jacques est une sorte de bulle confortable et rassurante.